ARBRE(S) – Michel Diaz – Setsuko Uno (octobre 2014)

 

ARBRE(S), éditions L’Atelier du livre (2014), livre d’art, 36 p.,  contient les reproductions d’une série de 21 dessins (à la pierre noire) de Setsuko Uno, accompagnés de 21 textes de Michel Diaz qui signe une introduction consacrée au travail de l’artiste.

Ouvrage de luxe au tirage limité, proposé en souscription (L’Atelier du livre, décembre 2014), ce livre, conçu (avec la complicité de Pierre Fuentes) pour le seul plaisir de partager avec quelques-uns ces dessins et ces textes, se situe délibérément « hors tout » : hors éditeur, hors dépôt légal, hors référencement, hors distribution et hors diffusion… Il n’est que pur et bel objet qui, en ne cherchant pas à s’inscrire dans « la chaîne du livre », s’octroie la liberté d’exister pour lui-même, en dehors de toute allégeance, qu’elle soit d’ordre culturel, éditorial ou commercial.

[…] Chaque dessin engage son silence, sa charge incorruptible d’émotion. […] Il nous faut, pour en pénétrer l’espace et atteindre l’intimité de l’image, emprunter le chemin de ces yeux sur lequel se découvre l’énigme de la nuit, et où quelques coups de crayon et de gomme ont suffi pour raviver la braise, soulevant aussi quelque chose qui nous touche et nous blesse à la fois, mais d’une joie sacrificielle, qui se dresse en articulant ses syllabes de flammes et que nos yeux se mettent à écouter.

Et faire en sorte que les yeux  écoutent, c’est ce à quoi s’applique l’oeuvre d’art, en ce qu’elle est chemin d’exil et d’expérience tout autant que creuset de révélation, ce à quoi Setsuko Uno, en toute discrétion, incite le regard de qui prend le temps de s’y arrêter. [Extrait de l’introduction]

Arbres-SU-MD

Extrait de la partie V, p. 26 :

     […] du plus intime de cet arbre solitaire, emmuré dans son corps de poussière, jamais né, dirait-on, jamais mort, oublieux de toute aube festive et de toute agonie, et qui a maintenant une ombre sur laquelle s’asseoir et se laisser aller à rêver son feuillage,

     puisque la lumière, on le croit, renaîtra de cette ombre fertile, pleine d’oiseaux timides, sans qu’on s’en aperçoive, comme croît le germe du feu dans un lit d’herbes sèches, que l’on sent s’éveiller la couleur du fond de son sommeil,

     mais l’arbre, dans le jour oblique et la lumière qui le sculpte, s’y écoute trembler, prenant forme et volume, se jouant du néant où toute chose sombre corps et biens, comme d’un roc inerte qu’on écarte, soulevant de sa face une peau de mille ans incrustée de lichens par les vents et les pluies,

     travaillant à faire apparaître un visage qu’on ne reconnaît pas, que s’opère dans sa chair même une fusion du temps comme à la vie, imperceptiblement lié.

 

 

 

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