Texte de Michel Diaz, cyanotypes de Laurent Dubois, Né de la déchirure, éditions Cénomane, 2015, 18€
Note de lecture publiée dans le N° 79 de Diérèse, octobre 2020
Des arbres depuis toujours nous connaissons la sensibilité, nous savons la vie qui les anime, nous savons que rien en eux n’est figé même si souvent nous avons voulu l’oublier pour n’y voir que la matière première, nature ordonnée dans le silence des forêts.
« L’arbre n’a d’autre défense que l’ancrage entre ciel et terre. »
Et voici dans ces pages exposées les aventures du bleu, de par la conversation entre les photographies à la remarquable technique de Laurent Dubois, le texte-poème de Michel Diaz et le temps qui pourrait être un autre auteur de ces proses et images.
Portraits d’arbres abattus, tronçonnés, épanchement d’un sang bleu et ce bleu aussi est un regard, en ces arbres parlent d’anciennes voix qui nous chuchotent « comme un secret confié à qui prête bien son oreille. » Le tronc à terre sera aussi notre corps secret et la source des mots, une question d’équilibre pour ces plans d’un rêve que le jour ne chassera pas : « On contemple juste ce bleu, qui apaise la faim et la soif, le couteau des questions, l’incertitude qui nous hante. »
« Quelque chose d’entrentendu, qui n’a ni nom ni forme… », le bleu devient la première matière du rêve, une revendication qui ne peut plus se limiter à ce qui est d’abord représenté, mais l’investit, le transfigure, le réinvente et le déborde, dans toutes les dimensions du temps lui-même.
Un livre qui ne peut se contenter de mimer « l’infinie patience de l’arbre » mais qui, inscrivant sa présence « sur la page ouverte de ses blessures », nous invite à rêver le Réel en ce qu’il a d’insaisissable.
Eric Barbier, octobre 2020