Sous l’étoile du jour – Jean-Pierre Boulic

Note de lecture de Jean-Pierre Boulic publiée in Poésie sur Seine N° 110


Michel DIAZ
Sous l’étoile du jour
Rosa canina éditions – 94 p – 20 €


Une nouvelle fois, la prose poétique de Michel Diaz, « tournant le dos aux
mots de l’imposture », taille dans le silex de sa « terre d’exil ». Et elle
déclenche de multiples étincelles. Il n’est rien d’ampoulé en effet dans ce
langage abrupt et fort : « telle est la voix d’un condamné qui s’obstine à
graver sur l’argile de son silence, et dans le râle des paroles, ce qui survit
toujours de rêves et d’oiseaux dans les feuillages de la mort ».
Venant, passant, allant par une sente de déracinement et de désarroi, aussi
de lassitude jusqu’à ne rien savoir, en exode, mais incrusté au réel d’une
« tragédie burlesque » touchant même au désastre, le poète qui, dit-il, a
l’errance pour bâton, la mort pour unique frontière et unique bien, séquence
l’ensemble son itinéraire d’incertitude, en tableaux au titre « parlant » : le
glas des égarés, poussière du poème, échancrure du jour, une patrie
toujours inachevée, entre le corps et la blessure, la tour de paille, charroi
des jours…
Certes, on sait les temps violemment désemparés et l’on observe bien que
tout fonctionne dans le mensonge et la manipulation des conditionnements
médiatiques. Néanmoins, dans ce décor, le poète tient lanterne. Quelle joie
humble et « opiniâtrement espérée » peut alors surgir et venir épancher sa
lueur près du déraciné d’un « royaume défunt » ? Est-ce cette « étoile du
jour » ?
Peut-être qu’en écho au précédent « Quelque part la lumière pleut » (Éd.
Alcyone) sur une civilisation sombre et sans raison, appelée à maints
désastres, Michel Diaz, porte-parole d’un travail suprême, ardent défenseur
du vivre et de la liberté de penser, pressent et voit que « le monde est
toujours là ». Doté du droit de regard, sachant écouter ce qui dépasse les
apparences dans « des interstices de lumière », il sait et peut « déchiffrer la
mémoire des arbres et lire sur les lèvres de l’herbe ».
Ici, nul retour à la nature comme on le prône tant désormais, mais un autre
regard, une prise de conscience et simplement le langage du cœur. Car il
n’y a pas de secret et chacun peut y trouver la réponse à l’effroyable afin
d’entrer dans une attitude de confiance, les « silences lui ont appris de la
beauté des choses à l’aube de tout ce qui existe ». Effectivement, ainsi que
le souligne Alain Freixe en préface : L’échec ne saurait prévaloir. Un
ouvrage à méditer.


Jean-Pierre Boulic

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