Michel DIAZ et Léon BRALDA – Au risque de la lumière
Éditions Alcyone 2023 (72 p ; 18 €)
Lecture de Jean-Pierre Boulic, publiée in Diérèse N° 90 (été 2024)
Il y a peu, Michel Diaz venait nous partager un cri du cœur avec le beau recueil « Quelque part la lumière pleut » chez ce même éditeur. Nous le retrouvons en compagnie de Léon Bralda afin de nous inviter à assumer « Le risque de la lumière » qui se défait de « l’ordre pesant du langage » dans un dialogue fécond et bienfaisant, incitant le lecteur à un véritable discernement.
Tout s’établit dans l’obscur d’un monde tordu qui se morfond sous « les gravats des jours », dont l’absurde somme chacun de n’avoir pas de temps, de manière à imposer alors à consommer, s’abreuver de jouissance ou…de violence, pour conduire de fait « à la nuit d’infinies solitudes ». Il est certes de bon ton aujourd’hui de deviser sur les blessures de ce monde, mais doit-on s’en satisfaire ? Ne s’agit-il pas a contrario de l’écouter et lui parler ? Lui suggérer une voie de confiance ? « Faut-il donc sans cesse tout réinventer ? »
Si l’on peut rappeler que la poésie se veut service inutile et pourtant indispensable, la lecture « risquée » de cette nouvelle rencontre-en-poésie donne à quiconque la faculté de défricher quelque peu « la lumière exacte de son humaine destinée…».
Oui, l’homme toujours marchant – car la route s’accomplit par sa marche – et marqué par le mystère de la vie, est appelé à sa propre aventure. Quel bleu voir surgir au-dessus « des vergers et des vignes » parmi « l’air rugueux » ? Le sujet de la poésie n’est pas d’inventer. Mais tout conduit à dépasser les apparences et à porter un autre regard sur les contingences. Quelle force de détachement se pourra exulter avec le poème vers « un avenir d’étoiles » ? Pour cela, faut-il « aller toujours plus haut, toujours plus loin » ?
N’y a-t-il pas seulement à chercher « ce qui a raciné aux estives des mots » dans l’urgence de la terre-poésie, « terre d’éveil » à « l’immensité des vies… » ? Nécessairement, se feront jour l’insaisissable, l’imprévu, l’inconnu, l’impensable, l’invisible, mais la « persévérance de l’herbe » penchera du côté de la jubilation où la quête de l’humain reconnaîtra finalement le temps gratuit de la joie, la douceur du passage, la fluidité du jour pour conquérir « un espace infini ». L’espoir qui a été semé dans l’obscur va germer.
Jean-Pierre Boulic